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Corps en Immersion

Une actualité dans les arts et les sciences à travers les corps pluriels.

Affects, flux, fluides. Représentations, histoires et politiques des émotions en arts

Publié le 31 Août 2018 par Anaïs BERNARD in appel a communications, Appel à communications

Feelings and Emotions - Mrs Neeraj Parswal - 2015

Feelings and Emotions - Mrs Neeraj Parswal - 2015

APPEL À COMMUNICATIONS

Affects, flux, fluides. Représentations, histoires et politiques des émotions en arts

Colloque international - 3 et 4 avril 2019 - Université de Strasbourg

Organisation : Université de Strasbourg (EA 3402) / Université Lille 3 (CEAC)

 

Longtemps considérées comme subjectives et anecdotiques et, à ce titre, indignes d’être historicisées ou de constituer des objets scientifiques, les émotions suscitent un intérêt croissant depuis le tournant affectif survenu dans les années 1990 (Stearns 1998 ; Reddy 1997 ; Massumi 2002; Sedgwick 2003 ; Clough 2007 ; Corbin, Courtine, Vigarello 2016). C’est avec une grande diversité d’approches scientifiques et méthodologiques que les phénomènes affectifs sont étudiés aujourd’hui, de l’anthropologie à la sociologie et à la philosophie, de l’histoire aux neurosciences. En France, dans le champ de l’histoire et de la théorie des arts, il reste encore à ouvrir un chantier de réflexion transdisciplinaire et intermédiale autour des problématiques liées aux émotions, aux sentiments et aux affects. Refusant toute définition restrictive pour travailler un objet aussi fluctuant et insaisissable que le phénomène affectif, il s’agira d’aborder les « émotions » les « affects », les « humeurs » ou encore les « sentiments » comme des réalités mouvantes et agissantes. En articulant émotion et perception, mémoire et histoire, corps et subjectivation, représentations et politique, temporalités et spatialités, ce colloque international appelle des contributions de toutes disciplines pour interroger les multiples enjeux liés aux manifestations émotionnelles en art, entre arts visuels et sonores, danse, performance, cinéma, arts numériques et littérature.

À titre indicatif et sans restriction chronologique, les propositions de communication pourraient explorer des problématiques associées aux axes de réflexion suivants :

AXE 1 : MATÉRIALITÉS DES ÉMOTIONS EN ARTS

La terminologie des émotions recouvre un spectre sémantique lié aux humeurs qui permet de toucher à des aspects très concrets, ceux des fluides, des formes, des aspérités de l’affectivité. Dans cette perspective, nous sollicitons des contributions transdisciplinaires portant sur les enjeux liés à la matérialité des manifestations émotionnelles. Il s’agira d’une part d’interroger la dimension tangible et sensorielle des œuvres d’art et d’autre part, de se demander comment les images et les narrations esthétiques sont (in)formées par les émotions. Comment étudier les ensembles de flux, de circulations et d’intensités affectives dans des médias tels que la performance ou les arts vidéo et numériques ? Comment se (dé)construisent les relations aux émotions dans les différents médias artistiques ? Les pratiques artistiques contemporaines renouvellent-elles nos rapports à l’affect ?

Cet axe souhaite avant tout s’intéresser à ce que font et à ce que produisent les manifestations émotionnelles. En s’appuyant sur une conception de la matérialité (“matter”) du corps comme « résistance à fixer le sujet » (Butler, 1993), on pourra se pencher sur les traductions physiques des modalités affectives : marques, plaisirs, blessures. En considérant que les pratiques artistiques et culturelles contribuent à produire et à faire circuler les phénomènes organiques, les manifestations physiologiques en histoire des arts - sécrétions, fluides, sexualités, maladies - feront ici l’objet d’une attention particulière. Pour appréhender la performativité et l’agentivité de l’émotion, du sentiment et de l’affect dans les pratiques artistiques, on pourra aussi se demander, en référence à la phénoménologie des émotions de Sara Ahmed (Ahmed 2004), comment celles-ci façonnent les corps et les objets, comment elles agissent sur le réel.

AXE 2 : POLITIQUES DES ÉMOTIONS

À la racine même du processus artistique, au cœur de la structure et du dispositif de l’œuvre, les phénomènes affectifs pourront être étudiés sous l’angle de la sensibilité individuelle et collective, en tant que processus relationnel. On pourra s’intéresser aux différents aspects liés à la production et à la réception des œuvres, à leurs mises en partage et leur travail collectif au sein des groupes et des mouvements artistiques. Par ailleurs, nous invitons des contributions étudiant les effets des rapports sociaux de genre, de race, de classe, de sexualités sur les émotions pour appréhender les enjeux politiques à l’œuvre dans les ressentis individuels. En s’appuyant sur les théories des affects dans les études féministes, queer et postcoloniales (Ahmed, 2004 ; Appadurai, 2007; Cvetkovich 2003), on peut ainsi prêter attention à des modes d’affectivité dissidents dans les pratiques artistiques comme tactiques de résistance ou de détournement de sentiments aliénants. Il s’agira d’envisager les vertus des irruptions et des surgissements émotionnels, c’est-à-dire de suggérer que les identités ne sont pas uniquement structurées par l’idéologie ou les discours. L’imprévisibilité et l’instabilité des manifestations émotionnelles peuvent ainsi être envisagées comme des éléments de perturbation des normes sociales. De telles approches permettent d’étudier la coexistence de groupes affectifs au sein d’un régime émotionnel dominant et les champs de lutte qui cartographient leur dissémination.

AXE 3 : MÉMOIRES DES ÉMOTIONS

Comment historiciser et archiver des phénomènes émotifs fuyants, instantanés, variables ? L’idée même que l’affectivité puisse être soumise au changement historique est relativement récente (Febvre, 1941). À partir des années 1980, au moment où l’exclusivité cognitive de la raison est remise en cause, tout autant que le caractère naturel et universel des états affectifs, l’histoire des émotions se développe, nourrie par l’anthropologie, les sciences cognitives et la psychologie. Depuis leurs modalités concrètes d’archivage et de conservation, jusqu’aux modalités narratives et historiographiques de leur inscription dans l’histoire de l’art, l’un des objectifs majeurs de ce colloque sera de contribuer à l’étude de l’histoire des émotions dans les pratiques artistiques. Dans la lignée d’Aby Warburg, en envisageant une temporalité historique non linéaire et hétérogène, il s’agit de se demander comment les gestes et les images artistiques et culturelles peuvent se faire vecteurs de transmissions et de survivances et comment les normes sociales interagissent avec ces codes. En outre, en s’inspirant par exemple de la notion d’« archive de sentiments » (Cvetkovichh, 2003) il s’agira d’inventorier et de retracer la généalogie des modalités affectives dans les productions artistiques et culturelles. Comment étudier les émotions dans les arts du point de vue de l’histoire et à partir des archives ? Quelle est la pertinence des archives et de l’histoire orales pour accéder aux sentiments ? Enfin, nous accueillerons également les contributions abordant les enjeux de l’anachronisme de la mémoire, de la résurgence, du “trou”, ou du traumatisme dans l’analyse et l’écriture des phénomènes affectifs en art.

 

Modalités de soumission

Les propositions de communications, de 500 mots maximum, accompagnées d’un titre et d’une courte biobibliographie de l’auteur.e, sont à envoyer avant le 14 octobre 2018, à colloqueaffects@gmail.com

 

Comité d’organisation

Clélia Barbut - Chercheuse associée au Cerlis, UMR 8070, Université Sorbonne Nouvelle, et à l'EA 1279, Histoire et critique des arts, Université Rennes 2.

Janig Bégoc - MCF en Histoire et théories des arts visuels, Université de Strasbourg

Anaïs Bernard - ATER en Arts visuels, Université de Strasbourg. Chercheuse associée à l'EA 3402 Approches contemporaines de la création et de la réflexion artistiques, Université de Strasbourg.

Anne Creissels - MCF en Arts plastiques et artiste, Université de Lille 3.

Johanna Renard – ATER en Arts visuels, Université de Strasbourg. Chercheuse associée à l'EA 3402 Approches contemporaines de la création et de la réflexion artistiques, Université de Strasbourg, et à l’EA 1279, Histoire et critique des arts, Université Rennes 2.

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