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Corps en Immersion

Une actualité dans les arts et les sciences à travers les corps pluriels.

Robots, poupées et techno-réalités au Japon. La fabrique des êtres artificiels

Publié le 16 Février 2018 par Anaïs BERNARD in conférence, artiste

Robots, poupées et techno-réalités au Japon. La fabrique des êtres artificiels

Le groupe d'études Populations Japonaises organise une journée d'études intitulée "Robots, poupées et techno-réalités au Japon. La fabrique des êtres artificiels".

Avec la participation d'Agnès Giard (Sophiapol, EA 3932, université Paris Nanterre), Zaven Paré (Université d’État de Rio de Janeiro, École supérieure de design industriel), Sasa Yûko (ISIR, UMR 7222, Sorbonne université).
Discutant : Yatabe Kazuhiko, université Paris Diderot
 
Vendredi 16 février 2018
14:00 - 17:30
Salle 3.08
Inalco - 65 rue des Grands Moulins 75013 Paris

Zaven Paré (université d’État de Rio de Janeiro, École supérieure de design industriel)
Pourquoi faut-il prendre soin des robots ?
 
Résumé: Tout comme l'étude des singes ne sort jamais du paradigme de l'hominisation en se référant systématiquement aux jeux des similitudes du comportement social, du cerveau et de la génétique; les développements des recherches en robotique placent les robots comme un nouveau miroir culturel, illustrant des paradigmes tout aussi prégnants.
Alors pourquoi faudrait-il commencer à se mettre à la place des robots pour les étudier vraiment?
Quel est leur regard sur nous, notre environnement, ou la société japonaise, par exemple?
Comment voient-ils l'avenir, avec ou sans eux?
Sont-ils simplement de serviles compagnons?
Est-il possible d'envisager que les robots passent du statut de propriété au statut de personne juridique: pourquoi et comment?
 
Sasa Yuko (ISIR, UMR 7222, Sorbonne université)
De relations humaines étiolées aux robots gluants
 
Résumé: Comment les humains rentrent-t-ils en relation communicante ? Certains « bruits de bouche » porteraient l’essence de mélodies qui constitueraient des primitives : ce sont des outils porteurs de socio-affects intentionnels capables de lier les personnes par une « glu socio-affective ». Ce lien serait comme un canal, qui s’il n’existait pas, ne pourrait pas véhiculer les éléments du langage (les mots, la voix, le regard, les expressions faciales, la posture, etc.). Certaines primitives vocales ont fait l’objet d’une étude perceptive comparative entre juges français et japonais, certaines communément perçues, mais dans ce cas sont-elles innées ou universelles ? D’autres encore sont fortement marquées culturellement à travers de faux-amis. Quel serait alors le potentiel universel de tels outils langagiers ? La présentation s’illustrera par une étude menée avec le robot Emox qui est utilisé comme un moyen d’observation, de capture et de simulation de la glu, pour instrumenter ce phénomène de construction relationnelle. Dans le rôle de majordome domotique d’un habitat intelligent, Emox est introduit auprès d’une vingtaine de personnes âgées, fragilisées par un isolement relationnel. À travers les commandes vocales, les interactions, qui sont contrôlées pour le robot, mais spontanées pour les personnes, changent progressivement. Leurs variations multimodales d’expressions communicantes, et l’évolution de la glu socio-affective sont ainsi mesurées, analysées et modélisées dans un système de dialogue fondé sur la courbe de glu. À terme, ce système est voué à évoluer sur le long terme, dans notre quotidien où la communication humaine fabrique cette glu. Le Japon, fortement marqué par le vieillissement de sa population, pointe également ce problème de l’isolement relationnel non psychopathologique et touche à travers d’autres populations plus jeunes tels que les hikikomoris, car sa nature socio-culturelle est sensible à ce problème d’isolement.
 
Agnès GIARD (Sophiapol, EA 3932, université Paris Nanterre)
Simulacres amoureux, stratégies d’échec : le corps de la contradiction
 
Résumé: Alors que sa population décroit, le Japon est devenu le premier producteur mondial de créatures de synthèse destinées à combler le vide. De façon révélatrice, le boom des simulacres d’humains est en grande partie imputable aux célibataires, dont le nombre ne cesse d’augmenter. Comment expliquer ce phénomène ? A rebours d’un certain discours moralisant qui désigne les simulacres comme des « agents de déconnexion », j’aimerais faire de ces produits des amplificateurs de tendance, dont ils pointent la nature iconoclaste : il est mal-vu au Japon de ne pas fonder un foyer. Encore plus mal vu de consacrer son temps et son énergie à une relation affective avec un être qui n’existe pas. Pour quelles raisons une part de la population s’inscrit-elle à contre-courant de la norme ? En resituant ces simulacres dans le contexte économique et culturel du Japon, cette étude entend saisir la production de présences « virtuelles » au prisme de ce que Foucault nommerait une hétérotopie de crise. M’appuyant sur l’hypothèse que les simulacres se font volontiers les complices de stratégies obliques, je poserai le postulat que la préférence affichée pour des personnages fictifs relève d’une attitude provocatrice au regard des standards culturels ambiants. Serait-il possible, pour aller plus loin, d’analyser ce phénomène comme une forme de dissidence : la dissidence matrimoniale ? 

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